mercredi 8 décembre 2010

Même le silence a une fin

J'ai un faible pour les livres de prisonniers, de survivants, d'histoires hors de l'humanité et finalement pleines d'humanité.
Après une grande période "camps de la mort" avec Germaine Tillion, Genviève De Gaulle ou Elie Wiesel, après les geôles marocaines et Tazmamart Cellule 10, direction la jungle amazonienne avec Ingrid Betancourt.
Non que j'admire spécialement la personne, en fait je connais assez mal son engagement, et je sais que l'Amérique du Sud est un continent plein de contradictions et la Colombie un pays très très corrompu et gangrainé par la drogue.
Il y a eu quelques livres de témoignages d'anciens captifs des FARC, mais leur côté "j'ai vécu chez les FARC", "oyez oyez je vais tout vous dire sur les bassesses des uns et des autres" ne m'attiraient pas vraiment.
Et puis j'ai vu ce livre. Edité chez Gallimard, un gage de qualité, et au titre si poétique : "Même le silence a une fin". J'ai craqué et je me suis lancée dans la lecture des 696 pages ...


Et là, je me suis trouvée projetée au coeur de l'Amazonie, un sac sur les épaules, les bottes détrempées, la peur au ventre et surtout la tristesse.
Parce que oui c'est un livre triste. Vivre 6 ans 1/2 loin des siens et ne sachant pas combien de jours, de semaines, d'années cela durera, demande une force intérieure exceptionnelle.
Et c'est là que Ingrid Betancourt devient une personne autre que l'image de la femme placardée sur la façade de l'Hôtel de Ville de Paris. Parce que cette femme là n'existe plus, elle fait place à son être profond, avec ses forces, ses faiblesses, ses doutes, ses espoirs et ses désespoirs.
Elle explique comment elle doit lutter dans un environnement hostile, et aussi lutter contre ses démons, ses défauts, ses mesquineries. Même si l'enfer c'est les autres, son pire ennemi est  en soi.

Le livre est très bien écrit, loin des témoignages habituels. C'est un roman à part entière. On se doute que tout n'est pas vrai ou du moins que ce sont ses souvenirs, les siens, pas ceux des autres. Jamais elle ne juge les autres, elle essaie de comprendre pourquoi certains agissent comme ils le font et pourquoi elle même agit comme elle le fait.

Sa force, c'est sa famille et Dieu. Elle fête les anniversaires de ses enfants chaque année, écoute sa mère à la radio, relit inlassablement la seule lettre reçue de sa maman, pense à son père et tous les souvenirs merveilleux de sa vie.

J'ai vraiment été transporté par ce récit qui fait partie de ces textes qui vous aident à réfléchir sur vous même, vos forces et vos limites.
Et franchement, à ceux qui critiquent Ingrid Betancourt, à ceux qui savent mieux que tout le monde ce qui s'est vraiment passé, à ceux qui la déteste sans la connaître ... banissez vos croyances, faites preuve de bienveillance et ouvrez votre coeur à une femme qui a vécu ce que jamais vous ne vivrez.

Kate Manzana

1 commentaire:

  1. Je méconnais assez la véritable Ingrid, n'en ayant eu, comme la plupart d'entre nous, qu'un portrait (pas toujours des plus heureux) vu par le prisme des journalistes (parfois assez haineux). Si ce témoignage réhabilite et le personnage et les faits, je serai ravie de le lire, ça doit être très poignant.

    Merci Kate

    RépondreSupprimer