vendredi 22 mars 2013

Les Révoltés de Cordoue



Il est des romans qui vous touchent et vous émeuvent profondément parce qu'ils font écho à d'anciens souvenirs, d'autres qui vous font voyager en des contrées merveilleuses avec leurs galeries de tableaux paysagés, d'autres encore qui vous enseignent un pan de l'Histoire, d'autres qui vous parlent de bravoure, de foi, de mort, de courage, d'amitié, de peur, de beauté ou d'horreur, toute la palette des sentiments humains : "Les Révoltés de Cordoue" d'Ildefonso Falcones, c'est tout cela, et encore bien plus !

1076 pages d'un roman d'une incroyable puissance, qui vous happent et vous prenent à la gorge et ne vous lâchent plus. 1076 pages narrant la cruauté, si ce n'est la barbarie et la sauvagerie des hommes - dans sa forme la plus paroxytique - luttant contre d'autres hommes : tout un peuple, celui d'Espagne, que l'Inquisition sépare en deux clans mortellement opposés : catholiques, vieux ibères et hidalgos, Bible en guise d'étendard face aux musulmans, maures brandissant le Coran à bout de bras et désignés par les Inquisiteurs comme une vermine à décimer. Dans ces deux clans, des hommes et des femmes, parfois innocents, souvent retors et barbares, qui n'ont de cesse de faire couler le sang.

De Grenade à Cordoue en passant par maints villages, les catholiques violent, égorgent, brûlent vifs, pillent et torturent, au nom de leur Dieu, la communauté mauresque. Aucun autre motif à ce carnage que leur croyance en leur Dieu un et unique.

Nous sommes à Juviles, petit bourg de Grenade, en 1568. Le jeune muletier Hernando, fruit d'un viol de sa mère mauresque commis par un prêtre catholique (disparu à sa naissance), est l'enfant rejeté par tous : musulman, mais aux yeux bleus, il ne trouve sa place nulle part. Et c'est bien malgré lui qu'il va être mené à jouer de nombreux rôles en ces temps de terreur : tantôt d'une absolue pauvreté, tantôt  couvert d'or et de gloire,  côtoyant les éminences catholiques tout comme les plus grands ulémas, affrontant mille périples, mille dangers, sauvé chaque fois miraculeusement de cent morts certaines, Hernando, au nom de sa foi et de son Dieu, Allah, souffrira dans son coeur et dans sa chair de la barbarie des hommes. Ecartelé entre sa foi et les événements, il perdra tout, regagnera tout aussi, sera rejeté, vénéré, maudit, mais jamais il ne déviera de la mission qu'il s'est promise de mener à bien : réunir chrétiens et musulmans dans un mutuel respect, prônant une cohabitation entre leurs croyances différentes afin qu'un jour la terre d'Espagne refleurisse en paix et puisse sécher ses larmes de sang.

"Les Révoltés de Cordoue", bien au-delà du roman, est un témoignage historiquement et théologiquement très riche, très documenté, dense, complexe, érudit. En un mot  magistral !

Si j'ai eu un peu de mal à entrer dans l'histoire (il m'a fallu persévérer les 110 premières pages) je n'ai ensuite plus pu lâcher ce livre à travers lequel j'ai beaucoup appris sur cette période de l'Histoire qui m'était jusqu'alors assez floue.

Je me souviens qu'il y a plusieurs années, visitant l'Alhambra (Grenade) et les jardins du Generalife, j'avais été ébahie et émerveillée par ce palais mauresque aux murs et plafonds comme des dentelles de marbre et de stuc, laissant filtrer dans ces ciselures une lumière qui touchait presque au Divin : lumière de craie andalouse.

J'avais déambulé à travers les patios aux carrelages colorés et aux rafraîchissantes fontaines, m'étais émerveillée devant la splendeur des nombreuses essences plantées dans les jardins du Generalife, enivrée du parfum de mille fleurs et plantes, j'avais déambulé parmi les fontaines, bassins et jets d'eaux.

Ildefonso Falcones m'a replongée dans ce cadre magnifique.

Pierre Vavasseur (Le Parisien) a très justement comparé "Les Révoltés de Cordoue" au "Nom de la Rose" d'Umberto Eco.

Enfin, si, comme moi, vous aimez les contes, je vous conseille la lecture des "Contes de l'Alhambra", édités en 1832 et écrits par Washington Irving, diplomate, historien et grand voyageur américain, qui vécut un temps à l'Alhambra. Voici l'édition que je possède, je ne sais pas si elle est éditée en France, car je l'avais achetée à Grenade, une très belle édition riche de dessins et aquarelles. Il existe sûrement d'autres éditions françaises plus récentes.




"Les Révoltés de Cordoue", d'Ildefonso Falcones (éditions Robert Laffont ou Pocket - 2012)


Pam Baileys

1 commentaire:

  1. ça donne envie !! et puis l'Andalousie c'est tellement incroyable !
    Merci Pam pour cette lecture

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